Nom : Pierce Prénom : Jefferson (alias Jeff) Âge : 21 ans, né un 19 novembre Origines : Anglaises Orientation sexuelle : Pansexuel (a eut plus d'expérience avec des hommes pour le moment). Groupe : Normalement Senior mais vu qu'il débarque... Emploi : Furet errant (c'est une blague) il est redoublant, quatrième année d'étude. Dominance : Ambi Famille de race mêlée : Ours Animal de race mêlée : Furet zibeline dark Appellation scientifique : Mustela putorius furo "zibeline dark" Quelle catégorie de poids : Léger
Identité
Goûts :
Aime :
être seul – boire un coup entre potes – qu'on lui foute la paix – Sa guitare et la musique punk/rock
N'aime pas :
qu'on l'emmerde – les mijorées – ceux qui se plaignent sans arrêt – les faux-culs – les timides – la société et ses règles en générale.
Jeff aime superposer différentes couches de vêtements. La musique, ça lui fait parfois oublier ses problèmes ou au contraire à passer ses nerfs. Il aime ça, se perdre un peu. Il n'aime pas qu'on le prenne de haut, sa réaction peut-être soit tout l'un, soit tout l'autre. Ignorance ou baston. Il aime qu'on lui foute la paix, aime faire pleurer les autres si la tendance s'y prête. Il aime ses origines Londoniennes, là où il se sent vraiment chez lui, même si ça lui rappelle des souvenirs douloureux. Il n'aime pas qu'on lui jette la vérité en face, qu'on touche des points sensibles. Se sentir faible ou vulnérable, il déteste ça. Alors la meilleure défense c'est l'attaque et il prendra goût à cette pratique. Réussir à faire mal quand on l'a fait se sentir vulnérable, Jeff s'en délectera, bien fait pour ta gueule, il vous dira sur un ton narquois. Il fallait pas te frotter au furet, c'est petit, mais ça mord fort.
Caractère : Mauvais en général. Il est d'une humeur plutôt instable. C'est un sang chaud parfois difficile à cerner. Il va sans dire que son caractère ne plait pas à tout le monde. Même si, comme beaucoup, il peut avoir bon fond quand il veut et être un bon ami, c'est plus souvent son côté détestable qui ressort malgré lui. Provocateur, Jean-Foutre, il n'a pas pur de cracher son fiel ainsi que ce qu'il pense des autres, quitte à en venir aux mains (et quitte à se prendre une branlée également.) C'est un solitaire qui mord, un sale mustélidé. Il n'aime pas qu'on empiète sur son espace vitale et pourtant, il apprécie ne pas être seul. On peut dire que les seuls avec qui ça peut passer seraient des personnes très patientes et tolérantes avec sa nonchalance et son franc-parlé vulgaire.
Pour résumer, c'est un jeune homme qui se complique la vie tout en étant persuadé qu'il vit simplement, en suivant ses humeurs. Pour peu qu'on arrive à le toucher, comme il ça a déjà été le cas,on peut trouver en lui quelqu'un de sincère et qui ne demande qu'à s'ouvrir. La confiance qu'il donne peu être brisée cependant, mais il en faudra sûrement beaucoup. Par son vécu, il est à même de supporter pas mal de situation lourde.
Comme dit plus tôt, malgré son caractère plus que difficile, il sait être un bon ami. Il sait rire et s'amuser malgré les apparences. Il n'aime pas vraiment être seul au fond, c'est juste qu'il ne laisse pas n'importe qui s'approcher. La confiance du furet est difficile à obtenir mais normalement, une fois gagnée, on peut compter sur lui. Il dira toujours ce qu'il pense, en bien ou en mal.
Autre chose, le furet est de ceux doués de leurs mains. Doué à la guitare, doué en dessin. Il fait partit des gens qui peuvent agacer, à venir jouer un morceau sur lequel vous galérez depuis des semaines qu'il jouera lui avec une facilité agaçante.
Physique : Allons droit au but pour commencer : Jeff fait environs 1m78 pour 65 kilos. Il a les cheveux blond, rasés sur le côté du crâne. Jeff est plutôt efflanqué, tout en nerf. C'est d'ailleurs de là qu'il tient sa force. Ce n'est pas non plus un surhomme bien entendu, cependant il ne vaut mieux pas le sous-estimer, s'il cogne, on le sent bien passer, faire voler deux ou trois dents, il sait faire. Il est dégingandé, voir un peu maigrichon, portant toujours des fringues soit trop grandes, soit trouées, un look punk et grunge.
La moitié du crâne rasé, on pourrait penser qu'il fait tout pour éloigner les autres de lui. Ancien rouquin, on devine cette couleur avec ses tâches de rousseur sur le museau. Il n'a pas vraiment (en général) une allure qui donne envie d'aller vers lui. Le visage émacié rendent les traits de son visage plutôt coupant et agressifs. Ses mains sont grandes, les articulations noueuses, trahissant un travail manuel régulier (on suppose). Souvent la clope au bec, ou plutôt un pétard (joint ou kiki), il semble errer sur île comme un lion en cage, ennuyé par ce qu'il l'entoure, blasé par la vie.
Ses lèvres sont fines, il a le museau qui peu rappeler sa race, en rapport avec fouine, furet, belette, hermine et j'en passe. Ses yeux sont gris clair, et comme tout rouquin de base, sa peau n'aime pas trop le soleil et il a tendance à vite roussir sous les rayons. Il a également quelques tatouages : des triangles sur les poignets et principalement des griffures qui partent des trapèzes jusqu'à des pattes de loups à la naissance des fesses. Il porte également des élargisseurs aux oreilles et a un piercing à la langue et a les yeux charbonnés (maquillage ou simple délavage de son masque de furet ?). Il a le regard de ceux qui ont vu et vécut des choses difficiles, qui en ont bavé dans la vie.
Histoire
Histoire : Il y a des gens comme ça, qui donnent l'impression d'avoir toujours été adulte, qu'on a du mal à imaginer enfant. Avec ce caractère, qui donne un aspect immuable et qui pourtant, on le sait bien, ont été innocent un jour, comme nous tous.
On peut dire que Jeff fait partie de ces gens, avec son look de punk et sa tête de furet. Et pourtant, il n'a pas toujours été comme ça, à se faire remarquer. Lui aussi, il a été enfant, chérit par ses parents. Petits gabarits, fier de l'être... Du moins ce n'est pas forcément venu tout de suite.
Comme tous les gosses, les petits ganarits s'écrasent dès qu'il a un peu trop de phéromones dans les airs. Les gros gabartis et les moyens mènent la danse quand ils sont dans les parages. Le plus faible trinque et celui qui a le plus de poisse mord la poussière. Chacun pour soi et Dieu pour tous, comme disent certains.
Avant de poursuivre, Jeff a peut-être été ce poissard cité, peut-être bien qu'il avait pissé sur un totem sans s'en redre compte, il s'était posé la question au collège. Mais en voilà un qui avait oublié d'être bête. Le furet n'était et n'est pas le plus intelligent mais il est malin et débrouillard. Voilà ce qui l'a à la fois sauvé et tiré vers le bas. Quand on doit échapper à des emmerdeurs, il faut bien trouver des idées pour se faufiler tout en évitant que les emmerdes nous retombe dessus.
Rien à foutre des histoires de conventions. Rien à faire des histoires de reproductions. Rien à branler des autres et de leurs problèmes existenciels. La société, Jeff lui crache dessus.
Quand on est un petit gabarit, on prend certaines habitudes, jusqu'à ce qu'on se rende compte qu'en fait tout le monde est finalement dans le même panier. Les gros gabarits peuvent séduire mais sans les plus petits plus fertiles, ils ne peuvent se reproduire et sont voués à l'extinction. Chacun sa merde. C'est comme ça que naturellement, Jeff s'est mis à traîner avec ses semblables. N'entendez pas là des gens de la même race ou un gabarit en particulier, il s'en fout...
Ceux qui se foutent des conventions, ceux qui critiquent la société, qui la provoquent... soit par l'attitude, soit par le look. La société, Jeff s'en tape, Jeff fait bien ce qui lui plait et ceux qui se pourrissent la vie à suivre les règles, ça le fait bien marrer. Et avec ceux qui sont bien d'accord avec lui, il partage musique, herbe, sexe et idées dans le Londres déjanté.
Avec son meilleur pote, il fait les quatre cents coups, se marre, se fait tatouer, partage et participe à des concerts clandestins dans les rues et les campagnes environnantes. On se fait même une virée en Allemagne à la fête de la bière. Jeff est heureux, mord la vie à pleine dents. Oui il se sent vivant, non il ne se laisse pas marcher dessus, oui il emmerde ceux qui protestent sur son tempérament douteux. Il n'y a bien que son meilleur ami et son groupe qui arrivent un temps soit peu à le dompter. Car personne ne l'empêchera de vivre sa vie comme il l'entend. Son meilleur ami, Klyde, ne mâche pas ses mots non plus avec Jeff mais les autres l'apprécient. Klyde a un don : celui de se faire des amis partout où il va. Il attire la sympathie, sans qu'il ait à se renier.
Tout aurait pu continuer sur cette voie, Jeff ne s'en serait pas plaint. Cependant, il faut bien un "mais" à cette histoire. La vie rappelle durement sa cruauté au furet, en lui arrachant son ami petit à petit. La maladie, le cancer, des gens en meurent encore de nos jours. Cet ami arraché à Jeff a été un coup trop soudain pour ce dernier qui n'a pu trouver un refuge que dans l'errance.
La rue devint alors sa compagne. Il se perd, s'égare, goûte à la manche, à la vie dans le froid et l'incertitude des lendemains. L'école de la rue est difficile, cruelle, mais Jeff s'y sent à peu près bien. Personne n'est sur son dos à lui faire la morale, à tenter de le faire rentrer dans le moule sociétale. Ce n'est que plus tard qu'il reprendra plus ou moins ce chemin. Grâce à quelqu'un, à un homme, le seul avec qui il avait plus ou moins gardé contact : son tatoueur. Celui qui l'avait baptisé avec Klyde. Plus âgé, plus mâture... Il arrive à percer la coquille du furet à lui faire entendre raison. Petit à petit, le faisant travailler avec lui, Matthew arrive à le convaincre plus ou moins de reprendre sa vie en main.
"Finis tes études... Jeff."
Voilà ce qu'il lui avait dit, ce que ses parents et amis espéraient pour lui.
"Reviens avec ton diplôme et on recommencera le groupe."
Jeff n'était pas totalement d'accord ou emballé à ces idées. Mais finalement c'est bien à cause de ces personnes que le furet se retrouve sur cette île. Encore meurtri par son vécu, encore sauvage et hargneux, il va cependant devoir aller jusqu'au bout.
Quatre années de galère pour se retrouver sur les bancs.
Vingt-et-un ans et deux ans de retard scolaire... Avec des morveux, lui qui ne fait que s'exclure, Jeff savait que ça n'allait pas être une partie de plaisiir.
Autre : Jeff a de la famille, un père, un frère et une mère, une soeur plus âgée ainsi qu'un petit frère et une petite soeur. Il joue de la guitare depuis plusieurs années. Il a le projet d'être tatoueur.
Suppléments
Le code :Validé Ton pseudo : Chester, Chess Ton âge : Plus le temps passe et plus cette question devient compliquée Notre découverte : Je suis l'origine de ce forum... Lol, mais j'ai donné le flambeau à notre génial admin Aaron qui a fait celui-ci <3 Ta présence : 1 fois par semaine Ton avatar : Je ne crois pas qu'il ait de nom mais son auteur est sur deviantart : creature13 ou creatureXIII. Tes références : J'ai commencé à lire le manga il y a longtemps et j'ai vu les OAV mais ça date un peu... Oups. Mais j'adore xD ! Un rajout : J'adore le forum, il est superbe *w*
Jefferson Pierce
Invité
Mer 24 Déc - 19:12
Hey ! J'adore ton histoire <3
♣ Tu es validé ♣
Va maintenant faire ta fiche de relations pour pouvoir faire plein de liens différents avec les autres membres du forum, ainsi que ta fiche de RPs pour que tu puisses tout de même savoir où tu en es dans tes aventures sur le forum ! Une demande de logement peut-être intéressante aussi, si tu veux avoir un petit chez toi et surtout... si tu n'es pas un étudiant et que tu en as les moyens~ Et pourquoi pas une demande de parrainage si tu es un kouhaï qui a besoin d'aide ou un sempaï qui veut proposer son aide ? Allez, va vite faire une demande de RP pour pouvoir découvrir de grandes aventures !
BONUS Pour les courageux et ceux qui aiment se spoiler, voici la vie plus détaillée du furet, quand il est allé dans la rue.
Spoilons mes bons ! (c) Odieux Connard.
Punk is not Dead:
Ce jour-là… Ce jour-là, il l’a regardé avant de fuir. Il n’a pas fui comme dans les films, en courant comme un désespéré pour sauver sa vie dans les couloirs de l’hôpital. Non, il l’a d’abord regardé pendant que ses amis se mettaient à pleurer, puis quand la douleur dans sa gorge, dans ses poumons, dans sa tête fut insoutenable, il s’écarta simplement, jusqu’à la porte. Il la poussa, sans que personne ne le remarque, sans se retourner, sans regarder quiconque. Son pas se fit de plus en plus rapide, jusqu’à atteindre le hall, jusqu’à atteindre l’extérieur, derrière l’hôpital. Le vent frais du printemps lui donna la chair de poule et il espéra… non. Il pria pour la première fois de sa vie pour qu’il n’y ait personne, pour qu’il soit seul. Mais il y avait un fumeur qui se tenait là, avec un autre en blouse blanche. Il tint bon, malgré la douleur qui le déchirait en deux, le bref coup d’œil fut le seul contact, le seul mince arrêt. Basculer maintenant ou tenir encore la corde ? Il fallait tenir, ce besoin de ne craquer devant personne est plus fort que tout. Il avance encore, se surprenant à craindre qu’il ne puisse trouver aucun refuge à temps. Et puis ironiquement, il se souvint de l’Eglise… Le seul endroit où peut-être, on ne lui demanderait rien et où personne ne viendrait le chercher. L’Eglise et son cimetière… Bientôt où celui qu’il venait de laisser boufferait les pissenlits par la racine. Il y arriva enfin, seulement entouré par les stèles, par le chant des oiseaux excités par le printemps, du bruissement du vent dans les feuilles. C’était une putain de belle journée. Son visage se tordit enfin, il lâcha un premier sanglot étouffé, encore timide, le corps tremblant. Il avait réussi, il pouvait enfin ouvrir cette plaie béante qu’on venait de lui faire, gémir sa douleur, fermer les yeux, les ouvrir à nouveau… Regarder sans voir à travers ses larmes, se cacher le visage dans les mains. Sa tête lui donnait l’impression d’être prête à exploser, elle cherchait des solutions pour apaiser cette souffrance, n’importe quoi. Se taper la tête contre un arbre, se jeter sous une voiture, sous un camion, sous un train. Il avait les images, le choc puis plus rien… Rien que le vide, le néant. Comme lui. Il n’y avait ni paradis, ni réincarnation… C’était juste comme… Eteindre une ampoule. Il n’y avait simplement plus rien. Ni courant, ni lumière… Rien que le vide le plus absolu. Les sentiments se bousculaient dans sa tête, comme autant de paparazzis autour d’une star, comme des mouches autour d’un cadavre. L’incompréhension, la peur, la douleur puis la colère. Cette salope de maladie n’aurait pas pu choisir quelqu’un d’autre ? Laisser la peine à d’autres que lui. Laisser cette souffrance à d’autres, peu importe qui… Il s’en foutait. Mais il n’y avait pas de retour en arrière possible, la vie n’efface jamais ses ardoises. Elle donne et reprend tout en une seconde, sans la moindre pitié, comme on écrase un insecte. Et lui il était là, seul face à lui, son désespoir comme seul témoin, ses larmes comme seules compagnes. Il arrivait à se calmer un peu, par moment, à ravaler ses sanglots, à calmer un peu son cœur qui le suppliait d’arrêter. Il aurait pu y avoir quelqu’un maintenant que ça n’aurait eu aucune importance. Il n’y avait plus que ce vide qui prenait place, petit à petit, l’envahissant… Ce vide qui ne laissa progressivement plus la place ni aux larmes ni aux sanglots. A genoux dans le petit carré d’herbe, il avait fini par s’arrêter de pleurer. C’était terminé. Clignant des yeux, il les leva pour apercevoir les traînées rosées… La journée touchait à sa fin. Ce matin, c’était le dernier… Ce matin, il avait ramené des comics encore, il les avait choisis avec soin… et non, son pote ne saurait jamais comment se termine l’aventure de Spiderman ou des Avengers. Malgré ça, le furet ne pleurait plus, il se leva, cligna encore des yeux avant de prendre une grande inspiration. Et maintenant ? Maintenant cette journée s’achevait, demain il en commencerait une nouvelle. C’est fou, se dit-il intérieurement, à quel point ces saloperies de films polluaient les cerveaux… C’était fou aussi, que son estomac se mette à gargouiller comme un malpropre à cet instant, le ramenant sur Terre. Le furet l’ignora, il ne pouvait pas se résoudre à se dire qu’il crevait la dalle alors que son meilleur pote venait de clamser. Et maintenant ? Qu’est-ce que je vais faire ? Rentrer chez lui ? Chez ses parents ? Continuer de barouder à droite et à gauche ? Non, non, il ne pouvait tout simplement pas reprendre sa vie. C’était trop tôt, rien ni personne ne l’avait préparé à ça… Mais tant pis, tout était bon pour échapper à la routine. Pour échapper à la douleur et à la peur. Il prit le chemin de son appartement. Il ne fallait pas y penser, juste agir, ne pas réfléchir, ne pas penser aux conséquences. Il fallait juste avancer, comme les requins-tigres. Ces bestioles-là, quand elles avancent plus, elles crèvent… Et quand elles peuvent plus avancer, elles défoncent tout ce qui passe. C’était à peu près ce que le furet avait en tête. Faire son sac, prendre le strict nécessaire, serrer les liens du sac, couper la sonnerie du téléphone en train de sonner. Enfin c’est bon, il sort, sans rien de plus… La nuit est tombée entre temps, maintenant il va pouvoir disparaître. S’enfoncer dans les rues, les ruelles… Il trouve un coin, sous un pont, il n’y a personne. Il va s’emmerder rapidement, les pensées tournent malgré lui encore et encore… Il regarde la Tamise, la grande roue illuminée de l’autre côté de la rive. Les lumières miroitent gentiment à la surface de l’eau. Longuement, le furet les observe, se plonge dans ses pensées, dans ses souvenirs. Jamais il n’aurait dû se retrouver là, sous ce pont, dans sa ville. Jamais il n’aurait dû se sentir si vide, si seul. Pour la première fois de sa vie, le furet vivait la solitude comme un fardeau, un calvaire dans lequel il s’était volontairement plongé. C’était le prix à payer pour n’avoir de compte à rendre à personne. Son cœur lui faisait trop mal et Jeffferson Pierce se dit à cet instant que le seul moyen pour lui de survivre à ça, c’était de couper les ponts avec sa vie, sa famille, ses amis. Il fallait s’amputer. Dans la nuit, à 23h, des SDF arrivèrent. C’était leur coin pour la nuit. Au départ, si Jeff les avait ignoré, il avait fini par leur parler. Puis il était partit acheter un gros pack de bière sous les regards médusés des deux réformés de la société. Un p’tit jeune punk qui part acheter de la gnôle pour la partager avec eux, c’était trop beau et un peu louche… Mais le furet était revenu avec ce qu’il avait promis. Finalement, la solitude c’était trop pour lui… Trop pour cette journée. Il avait donné, maintenant il voulait juste oublier, jusqu’au lendemain, jusqu’au lever du jour. Ces deux types étaient sa solution. Il but avec eux, discuta un peu, sans vraiment sourire. Leur avouant, entre deux phrases que la vie n’était rien qu’une pute, qu’il n’avait plus rien, qu’il avait tout perdu. C’était faux. Il le savait, il avait encore des amis, de la famille… Cependant, son cœur ne l’entendait pas ainsi. On lui avait arraché une partie de lui-même. Tandis qu’ils discutaient, Jeff porta les yeux sur Big Ben. Minuit vingt-sept. Jeff resta plusieurs minutes à regarder l’aiguille poursuivre sans route, sans marquer d’arrêt, sans ralentir. Elle avançait, c’était tout. Kyle était mort.
Il avait voulu passer le voir. Juste pour lui dire merci, pour lui renvoyer l’appareil. Dans la rue, c’est donnant-donnant. Ca faisait trois ans maintenant, depuis cette nuit passée sous le pont avec le général et l’vieux Lulu. Il avait fini par connaître leur histoire malgré lui. Les histoires aussi incroyables que banales pour ceux qui vivaient dans la rue. Le général avait une maison, un chien, un jardin, il était veuf, il avait une famille, des petits-enfants. Il aimait leur décorer le jardin pendant les fêtes, faire un énorme sapin. Il avait été un père strict, parfois difficile à vivre, pour être un euphémisme. Il avait été alcoolique, pendant longtemps. Non, il n’avait pas été un bon père, ça avait même été un salaud, c’est comme ça qu’on dit. Mais il avait changé, une fois les enfants sur la bonne voie, une fois assez grands pour le rembarrer, pour lui renvoyer à la face toutes les colères injustifiées qu’il avait passé sur ses gamins. Oui, le général avait changé. Il était devenu quelqu’un de meilleur, surtout une fois grand-père. Il avait été un mauvais père, il avait décidé d’être un grand-père exemplaire. Mais il avait fallu faire face à l’argent… L’pognon, ça manquait trop. Et si sa fille avait acceptée de le garder un temps, elle avait fini par craquer. On efface jamais vraiment les ardoises, papy allait payer. Les enfants n’avaient pas compris, c’est pas grave. On déménage, on peut pas t’emmener avec nous. Va chez ton ami Fréderic. Frédéric était en maison de retraite… son appartement était vendu. Le général s’était retrouvé à la rue. Au début, il avait pris une chambre d’hôtel, il avait tenté des démarches… Entre temps, ses maigres économies avaient fondues comme neige au soleil, il avait dû quitter l’hôtel. Le cercle vicieux avait déjà pris sa place. Il avait dû commencer la manche, accepter de devenir transparent parmi la foule juste bonne à éviter de marcher sur les paumés comme lui. Parce que c’est ce qu’il était devenu : un paumé. Et puis il y avait l’vieux Lulu. Un ancien chef d’entreprise, accablé par les dettes, trompé et quitté par sa femme… Parce qu’il avait fourré son nez ailleurs. Et puis ses amis s’étaient progressivement volatilisés. Pouf, plus personne, silence radio. Voilà deux façons pour se retrouver à boire de la bière sous un pont de Londres. Ces deux-là n’avaient pas choisi de finir comme ça, déformés par le froid, la pluie, l’ignorance. Le furet avait choisi. Il n’en parlait pas, n’en parlait jamais. Les autres savaient que le p’tit punk voulait jamais en parler, qu’il se fermait à chaque fois. Et puis au fond, ils s’en foutaient tous. C’était pas ça qu’on regardait dans la rue, dans les bas-fonds. Ce qu’on regardait, c’était le degré de folie, dangereux ou pas, instable ou non, si t’étais une balance ou un mec fiable. Jeff était pas une balance, il fallait juste pas lui chier dans les bottes. Après comme tout, dans la rue, c’est chacun pour soi, il y a rarement une véritable entraide en cas de coups dur. C’était ce que Jeff allait vivre, juste avant de basculer. Il était aux alentours d’une heure du matin, c’était en février. Il faisait un froid de loup mais le ciel était clair. Son sac avait plutôt bien vieillit malgré les mésaventures qu’il avait eu… La gueule plutôt dégueulasse, les cheveux ternis, noircis par la crasse. Le furet renifla et s’essuya le museau du poignet. Ca faisait une semaine qu’il n’avait pas vu Jack. Un type plutôt sympa, toujours accompagné par un corniaud croisé porte et fenêtre. Un chien de taille petite mais correcte, blanc, avec un macaron noir sur chaque œil. Dot, il s’appelait. Pas très original mais au moins pas trop de problème pour mémoriser. Dans son blouson amoché, le furet avait fourré une bouteille de vin bon marché, pas le truc le moins cher, un « bon truc ». Ce type l’avait dépanné alors qu’il crevait la dalle. Il aurait pu aller chez Matthew s’il n’était pas aussi têtu. Faire la manche, Jeff avait fini par accepter, faire la manche chez son pote, il ne pouvait tout simplement pas. Alors bon, ce type méritait bien de se bourrer la gueule avec une bonne gnôle pour une fois. De toutes façons son foie était sûrement déjà foutu. Arrivé près du squat où Jack créchait, il s’arrêta, figé comme un lapin devant des phares. Ce qui l’alertait, c’était les aboiements agressifs de Dot qu’il voyait s’agiter. L’animal, plutôt placide d’ordinaire, semblait être devenu une bête féroce. Jeff n’était qu’à une dizaine de mètres, dans l’ombre. C’était un petit parc avec arbres et buissons fournis… Le furet se courba, caché par l’un d’eux. Dot aboyait férocement, grognait après un type qui menaçait Jack et l’animal, mue par le courage qu’ont les chiens pour secourir leur maître, mordit à plusieurs reprises les mollets, sauta vers la main ennemie qui empoignait Jack. Ce dernier a les mains en l’air, il tente de calmer son chien qui n’écoute rien. Le coup de pied part se loger dans les côtes de Dot qui se fait proprement éjecté par l’inconnu. Le cri de douleur est perçant, transperçant la nuit. L’inconnu monte en pression, Jack jette un regard terrifié et meurtri vers son seul compagnon, son seul ami. Dot gémit, il a atterri près de Jeff qui jette un regard à l’animal. Il le devine, malgré le manque de lumière, il voit la cage thoracique enfoncée, Dot agonise. Hypnotisé, choqué, Jeff est brusquement sortit de sa torpeur par un cri étouffé. Il redresse la tête, voit les yeux écarquillés de Jack, figé dans la douleur, il fixe son agresseur, son tueur. Un éclair ressort, sanguinolent, pour aller se reloger dans le torse. Jeff sursaute, l’autre ne s’arrête pas dans sa folie, il s’acharne, enchaîne jusqu’à ce qu’il ne puisse plus tenir Jack qui est mort depuis un moment déjà. Dot aussi, il a arrêté de gémir. Jeff s’accroupit, son cœur bat à tout rompre, son sang pulse contre ses tempes. Il doit fuir, vite. L’autre gars, encore hagard, semble un peu déboussolé. Le furet lui, décide de ce moment pour prendre les jambes à son cou. Il ne se retourne pas, la bouteille glisse et se fracasse au sol dans un bruit qui lui semble assourdissant. Il est juste derrière toi, cours mon gars. Cours comme tu n’as jamais couru. Le furet avait perdu de sa force en trois ans mais pas sa vitesse. Il n’avait jamais couru si vite, si bien. La peur donne des ailes, c’est ce qu’on dit. Le furet prend les rues qu’il connait, vire à droite, bascule à gauche, manque de se rétamer, se mange une poubelle alors qu’il jetait un œil en arrière. Personne ? Pas le temps de bien voir, la panique le prend aux entrailles, il reprend sa course malgré ses poumons qui s’embrasent, malgré ses jambes qui prennent feu. D’instinct, il se dirige vers le seul refuge qu’il connait, le seul qu’il a. Et puis, au bout de longues minutes, il ralentit, vérifie ses arrières. Personne. Juste quelques voitures. Il s’arrête un instant, s’appuie dos contre une vitrine de godasses. Il sait qu’ainsi, on ne pourra pas le tuer par derrière, il peut surveiller les alentours le temps qu’il reprenne son souffle. Il reste comme ça quelques minutes, la gorge en feu, des picotements dans la bouche, les prémices d’un haut-le-cœur. Il dégueule de la bile. La salive encore pendante à ses lèvres, il ne peut s’empêcher de regarder encore autour de lui. Ca le reprend, plusieurs fois, il transpire, il n’a plus rien dans l’estomac à tel point que ça en devient douloureux. Enfin, après un moment, il se redresse difficilement, transpirant, parcourut de sueurs froides. Il chancèle mais n’oublie pas de regarder autour de lui une dernière fois, parcourant les derniers mètres qui le sépare de son refuge. Il ne peut plus courir, il redoute chaque ruelle sombre devant lesquelles il doit passer. La peur de se faire happer dans l’obscurité, de ne plus être dans la lumière rassurante des lampadaires. Puis enfin, l’immeuble, l’interphone, le nom de son sauveur. Plus loin dans la rue, il entend d’abord des sirènes, puis il voit les lumières clignotantes, s’arrachant dans la nuit. Des secours… Le furet ne peut s’empêcher de se demander si c’est pour Jack. C’est trop tard, il est déjà raide, c’est sûr. Jeff hésite soudainement à sonner chez son ami, préférant se redonner un peu de contenance : il a décidé de ne rien dire, de cacher la vérité ou plutôt… de mentir. Il sonne une fois, juste assez longtemps pour être sûr de le réveiller. Il attend un peu, regardant une dernière fois dans la rue avant de sonner à nouveau. C’est finalement une voix mal embouchée qui lui répond, il s’annonce, la porte s’ouvre et lui s’engouffre dans le hall. Il ne prend pas l’ascenseur, il préfère être libre de ses mouvements et surtout, après une soirée comme celle-là on devient superstitieux, frisant la paranoïa. Matt l’attend à sa porte qu’il a ouverte, la tête dans le cul, en calbute, clairement mécontent d’avoir été réveillé. Matt le fait entrer, lui propose à boire tout en râlant sur l’heure plus que tardive de cette visite. Jefferson s’excuse mais ne trouve pas la force de le taquiner. Feindre que rien ne s’est passé, feindre que tout est normal, que tout ça n’a pas existé. Son ami lui offre la douche, c’est qu’il fouette un peu, le poto. Le furet ne refuse pas, au contraire, il profite de la douche et du canapé offert, toujours mieux qu’un tas de fripes dégueulasses ou qu’un matelas qui empeste. Jeff sait que son ami est loin d’être un imbécile, que sa comédie est inutile, juste assez bonne pour faire comprendre qu’il ne veut pas en parler. Matt l’a deviné, Jeff le sait… ça n’a jamais été dans ses habitudes de débarquer au milieu de la nuit… Mais peu importe, il sait que Matt ne le forcera pas, qu’il le laissera dormir ici sans poser de question. T’as bien fermé la porte ? Juste avant qu’ils aillent se coucher, le furet ne peut s’empêcher de poser cette question. Il sait qu’il est découvert mais peu importe. Il finit dans le canapé, dans l’obscurité à peine éclairée par les lumières extérieures. Jeff tremble en fixant l’heure sur lecteur dvd en face de lui. Il repense à ce qu’il a vu, revoit les yeux révulsés de ce pauvre Jack, entend les gémissements de Dot. Son cerveau fait tout tourner en boucle, parfois dans le désordre, comme s’il cherchait une réponse à tout ça, une raison logique. Mais Jeff sait qu’il n’y en a aucune, Jack s’est juste fait dessoudé par un détraqué, un toxico, son clebs avec. Il reste comme ça, roulé en boule, tentant de résister à ce besoin d’aller vérifier la serrure, d’aller regarder à la fenêtre du salon. Il tente de raisonner en vain son instinct en alerte rouge, impossible. Jeff se lève, sans un bruit, les jambes douloureuses, il tourne la clef. C’est bien fermé… Il pousse la clenche qui reste bien close. Il réitère, pour être sûr. Tente de tirer la porte. Rien, c’est fermé. Jeff se traite de con mais il est rassuré. Maintenant c’était au tour de la fenêtre. Il s’y rend, se met sur le côté, ouvre un peu le rideau, juste assez pour regarder dans la rue. Rien, personne, pas un rat. Si ça se trouve, l’autre cinglé ne l’avait jamais remarqué, jamais suivit. Mais la rue ça rend un peu parano, il voulait juste se rassurer. Les traits tirés, il déglutit, lâche le rideau. Impossible de dormir. Pas avec ces images en tête. Pas avec cette trouille qui ravage encore son bide. Il crevait d’envie d’aller dormir avec Matt, comme un mioche. Il se surprend à vouloir redevenir un gamin, juste pour pouvoir retrouver quelqu’un de rassurant sans avoir à se justifier. Il vaut mieux rester sur le canapé, regarder la télé par exemple, s’abrutir un peu… Il retourne s’installer, emballé dans le duvet de son pote, le son au plus bas suffit. Maintenant, il n’y avait plus qu’à zapper et à se vider la tête. Il finit par tomber sur une succession d’émissions amerloques. Jusqu’au petit matin, il s’obstine à rester éveiller, refusant de dormir par peur des cauchemars, par peur de se faire surprendre. Il fallait tenir jusqu’à ce que Matt se réveille. Et il arrive vers 8h30, environ. Enfin le poids s’allège un peu. Matt ne lui pose pas plus de question, il propose juste au furet de rester chez lui, il sait ce que son ami attend de lui. Deux ou trois coups de fil dans la journée et puis Matt rentre au soir. Il aurait pensé que comme d’hab, Jeff serait partit. Mais cette fois ça n’est pas le cas, le furet est encore là, endormi comme une loque non pas sur le canapé mais sur le lit. Ce sale petit furet n’en loupe pas une. Il le laisse dormir, se fait un café, se prend une douche, reprend un café en allumant la télé. Il savait parfaitement… Parfaitement qu’il s’était passé un truc mais quoi ? Encore une bagarre qui dégénère un peu ? Des ennuis ? Des agressions ? Jeff n’en a jamais vraiment parlé mais il s’en doute, avec tout ce qu’on racontait à la télé, certains de ses clients… Il suffisait de faire un petit cocktail pour se faire une idée de ce que c’était, la vie dehors. Rien de bien folichon. En zappant, quelque chose l’interpella. Il revint en arrière et lu le titre un peu mieux. La journaliste continuait de commenter les faits. C’est le meurtre d’un SDF et de son chien, même les résidents alentours étaient interrogés. C’était juste un clochard, toujours avec son petit chien blanc, pas méchant pour deux ronds. C’est un acte qui a choqué tout le monde, on cherchait encore le meurtrier. Bien entendu, personne n’avait rien vu, rien entendu. Ce parc, il savait à peu près où il était, le lien était facile à faire mais difficile à envisager. Tout au fond, Matt espérait que Jeff n’était pas venu ici suite à ce meurtre, même si le temps pouvait coïncider, même si tout poussait à croire cette hypothèse, il se disait encore que ça n’était qu’une coïncidence, que le p’tit punk n’avait rien à voir là-dedans. Merde. Le Loup se pinça les lèvres, il avait envie de savoir maintenant, de tirer une bonne fois pour toute les vers du nez de Jeff. Ca faisait près de trois ans et demi qu’il traînait sa peau de mustélidé dehors, ça devait s’arrêter une bonne fois pour toute. Il fallait patienter. Et puis enfin, le furet pointa son museau, les cheveux en bataille, la tête en vrac, en calbute lui aussi, plus maigre qu’il avait déjà pu l’être. « Bien dormi ? » « Mouais… » Jeff se frotte la goule puis se laisse tomber sur le canapé, la tête dans les mains, il continue de se frotter, et frotte et frotte… « Il s’est passé quoi hier soir ? » Jeff se stoppe une seconde puis reprend son manège avant de s’arrêter. « Rien d’spécial. Je me pelais juste le cul. » Matt le fixa avant d’allumer la télé, zappant jusqu’à tomber sur les nouvelles qu’il cherchait. « Le meurtrier n’a toujours pas été retrouvé. Pour le moment, tout le monde est encore sous le choc. » « L’assassin lui a assené près d’une quinzaine de coups de couteau, on pense que c’est un règlement de compte. Après il faut que nous ayons d’autres éléments pour avancer dans l’enquête. » Pendant que la télé déblatérait ses infos, Matt observait Jeff qui avait clairement blanchit. « Jeff, pourquoi tu me dis pas la vérité ? Pour une fois. » Un silence, le furet baisse les yeux, il ne peut plus se cacher, il s’en doutait mais il ne pensait pas que ça prendrait si peu de temps à Matt. Avec difficulté, il déglutit, s’humecta les lèvres. « J’ai tout vu… » Un autre silence, Matt coupa la télé et il regardait maintenant le furet dans les yeux. Jeff semblait soudain épuisé, à bout de force, le loup semblait tout juste remarquer que les yeux du furet étaient salement creusés, les joues idem, ce n’était qu’un fantôme. Il n’y avait bien que cette lueur encore un peu vivante au fond des pupilles grises. « J’ai tout vu et j’ai rien fait… Je me suis barré comme un crevard. » Il craquait. Il ne pouvait pas garder ça, il ne pouvait plus garder davantage en lui. Des tics nerveux commençaient à s’emparer de lui. « Tu pouvais rien faire pour lui Jeff. » Matt posa à peine sa main sur l’épaule du furet que ce dernier le rejetait, se levant brusquement, coupant le contact. Il eut un rire bref, amer, presque mauvais. « Qu’est-ce que t’en sais ? T’étais pas là ! » Le furet secoua la tête, comme s’il revivait le choc de la nuit dernière, son corps recommençait à se crisper, à se tendre. « Je… J’aurais pu intervenir… J’ai tout vu mec… Et moi je me suis planqué comme un connard, j’ai rien fait. Et puis il l’a planté. Et moi je… J’me suis juste barré. » Sa voix s’étranglait, ses lèvres tremblaient. Pourtant c’était pas le premier macchabé qu’il voyait, loin sans faux. Un silence se posa, Matt se leva lentement, ne lâchant pas son jeune ami des yeux. Le mustélidé lui, avait relevé le regard sur le loup. Les pupilles dilatées, le regard vacillant. « J’aurais pu appeler les flics… J’aurais dû le faire. » « On peut aller les voir si tu veux… » « Et dire quoi ? Je… J’ai vu la scène c’est tout, j’ai jamais vu la gueule de ce taré ! Il était de dos. » Il se tenait encore à distance du loup, il ne voulait pas être touché ni approché. « Jeff… Je te connais suffisamment pour savoir que… Si tu pensais être capable de faire quelque chose, tu l’aurais fait. » Matt l’attrape doucement par les épaules, Jeff se dégage encore. « Alors c’est que tu m’connais pas mon vieux ! » « Oh si je te connais. Il fixa le furet qui lui secoua la tête, refusant d’entendre ça. Il eut de nouveau ce même sourire amer même si on regard gardait cette lueur perdue, instable, derrière un voile de colère, de haine. « T’en sais rien du tout… Peut-être que tu me connais dans un contexte… normal. » Il avait montré l’appartement des yeux avant de les reposer sur le loup. « Mais dehors, c’est pas pareil… Dehors c’est la jungle mon pote. Dehors on te plante juste pour avoir un vieux bout de couverture déchirée, pour un bout d’pain ou juste parce ta tête revient pas au taré du coin ! Dehors c’est chacun pour sa gueule… C’pas le premier à clamser devant moi ! » Son regard s’était fait froid, dur, implacable. « On sait jamais à qui on a affaire. On est rien pour les autres… On est transparent… Là c’est juste que retrouver un clochard dans un parc public, ça fait pas propre pour les bonnes gens alors forcément tout le monde se met à avoir d’la compassion. Mais c’est comme ça tous les jours dans la rue ! Et je suis comme eux ! Moi aussi, dès qu’ça craint, j’me casse et j’demande pas mon reste ! » Le ton montait, comme la pression dans les veines de Jeff. Les muscles de son cou se tendaient comme des arcs sous sa peau, les dents serrées, il était comme une bouteille de gaz trop proche d’un feu. Matt le regardait simplement, sans cligner des yeux, le visage n’exprimant que la concentration, presque comme un visage sévère. Il le tenait, il n’allait pas le lâcher. « Tu ne pouvais rien faire, Jeff. » Le furet fixait son ami avec difficulté, clignant des yeux pour ravaler les larmes qui montaient, comme on déglutit pour ne pas sangloter, comme on sert la gorge pour ne pas hurler. Affronter un regard, c’était affronter un jugement. « Tu comprends rien… J’aurais pu le sauver… » « Avec quoi ? Tu portes une arme sur toi peut-être ? » Le furet fit non de la tête, baissant finalement les yeux. « Ce type m’a filé à bouffer alors que je crevais la dalle… Il l’a fait alors que j’aurais pu… » J’aurais pu venir chez toi, mais j’étais trop embarrassé pour le faire. Trop fier pour demander de l’aide. « Ce n’est pas de ta faute. Tu l’as dit toi-même : ça arrive tout le temps. » « Mais lui j’aurais pu faire quelque chose ! J’aurais pu au moins essayer ! Je… » Parce qu’il n’avait rien pu faire pour sauver Kyle. Parce qu’il était impuissant face à la maladie. « Lui il y serait allé… Il n’aurait pas hésité, ce sale con. » Matt mit un temps avant de comprendre de qui il parlait, du moins, il supposa. « Tu parles de Kyle ? » Un silence, Jeff ravala son sanglot, dompta ses nerfs tant bien que mal. Comment pouvait-il exploser seulement maintenant ? Après tous ces efforts pour y échapper ? Il leva les yeux au ciel, puis les ferma. Dans la seconde, il les ouvrit, comme si c’était encore plus dur ainsi de ravaler ses larmes, de tenter de contenir le flux avec un barrage déjà fêlé de toute part, prêt à se briser. « Kyle ne t’aurait pas blâmé pour être partit. Il était loin d’être parfait. » « Tu l’connaissais pas autant que moi ! » Le furet se pointa vivement du doigt. « Peut-être bien, oui. » Matt gardait un sang-froid impressionnant, il n’allait pas pleurer avec le furet, pas question. Non, il savait parfaitement, pour la première fois, ce qu’il devait faire. Doucement il s’avança, posa à nouveau ses mains sur les épaules du mustélidé qui cette fois-ci fit simplement une rapide grimace. « Mais je sais qu’il tenait à toi, assez pour préférer que son meilleur pote se casse plutôt que de risquer sa vie inutilement. » Le punk ne répondit rien, il semblait juste lutter de toutes ses forces pour ne pas affronter le monstre qui grondait en lui, ce dernier qu’il fuyait depuis trois ans. « Il… Ce sale enfoiré, il souriait… Il m’a souris en m’envoyant chercher du café. J’me suis rendu compte de rien. Il m’a… » Ses sourcils se froncèrent, l’amertume était trop forte. « Il est mort tout seul ! … » « … » « C’est vraiment… Vraiment qu’un sale fils de pute ! … » Et les larmes coulaient déjà sur ses joues, tandis qu’il regardait Matthew. Il n’ajouta rien, les deux amis gardèrent un silence presque religieux quelques instants avant que Jeff n’essuie ses larmes, tremblant. « Merde ! … » Alors qu’il se pinçait le haut du nez, pour s’aider à se calmer, il sentit une main sur sa joue, l’arrachant à sa douleur. Le Loup avait la main chaude, chaleureuse, comme ses yeux d’un jaune mordoré. « Kyle n’en savait rien… » « J’vois pas ce qui te fais dire ça ! » Jeff repoussa la main d’un geste sec mais Matt la reposa aussi sec, plus fermement, il le tenait.
« Parce qu’il était humain… Et que personne n’aime mourir seul. Il ne t’a pas envoyé exprès, Jeff… Tu ne l’as pas su parce que tu es parti trop vite, parce que tu étais incapable d’entendre ce qui t’entourait à ce moment-là. » Jeff n’en savait rien, effectivement… Il n’avait pas cherché plus loin que le bout de son nez. « Je sais que c’est une maigre consolation et que ça n’aurait sans doute rien changé à ta décision… Mais tu ne crois pas qu’il est temps de reprendre ta vie en main ? » L’incompréhension se lisait dans les iris acier du furet. Et devant ça, Matthew lui sourit avec bienveillance, posant l’autre main sur la joue de Jeff. Maintenant, il tenait son visage, avec une fermeté tendre. Jeff était simplement terrorisé. Il avait de nouveau baissé les yeux. « Il faut que tu sortes de la rue, Jeff… Tu dois arrêter maintenant. Il faut que tu reviennes, parce que je te laisserai pas gâcher ta vie. » Petit à petit, la coquille craquait, se fendillait, volait en éclat. Le furet était tout simplement mis à nu. « Je peux pas… C’est au-dessus de mes forces. » Matt eut un petit rire de nez. « Je ne te laisserai pas fuir une fois de plus, Jeff. Tu vas revenir. Arrêter tout ça. » Cette main tendue, Jeff semblait avoir du mal à y croire, comme on a du mal à croire à du secours après des semaines passées dans le désert. On se demande si ce n’est pas encore une hallucination, un mirage. « Je vais t’aider, je te lâcherai pas cette fois. » Il pouvait se battre encore, il pouvait s’arracher à ces mains chaudes rassurantes, réconfortantes mais cette fois le furet semblait s’avouer vaincu. L’usure avait fini par avoir raison de lui. Pour la première fois depuis des années, il y avait enfin de la reconnaissance au fond des prunelles grises. « Tu vas en chier, tu le sais… ? Je vais te faire devenir chèvre. » « Tu m’as déjà fait devenir chèvre, p’tit con. » « C’est toi le con. » Jeff lui donna un coup à l’épaule. Matt lui sourit un peu plus, répondant à celui que Jeff lui offrait. Le seul sourire reconnaissant que le furet avait donné dans sa vie. Il se sentait comme un naufragé agrippé par tout un équipage après des semaines passées sur une île abandonnée, comme un mec arraché à la neige après une avalanche par un chien et ses maîtres. Pour la première fois depuis trois ans, il se sentait vivant. Il avait l’impression que son calvaire prenait fin, qu’il n’avancerait plus avec la sensation de ceux qui ont étés maudits. « Merci… Matthew. » Se rendre compte que tout ce qu’on voulait, c’était la reconnaissance de sa simple existence, que tout ce qu’on désirait, c’était d’être simplement apprécié, qu’on voulait simplement voir que les autres tenaient à nous… Jeff ne s’en rendait pas compte bien entendu, mais ce qu’il vécut à cet instant avait ce même sentiment de plénitude : Enfin, il avait une chance de faire surface. Enfin, il pouvait tout simplement exister de nouveau. Finalement, il y avait peut-être un peu plus que le néant après la mort.
Il s’était passé quelques semaines depuis cette nuit-là. La nature de Jeff a toujours se barrer ne s’était pas évaporée du jour au lendemain cependant, Matthew, comme promis, ne l’avait pas lâché. Malgré tout, tout ceci n’avait été qu’un moment de faiblesse, le furet avait douté, Jeff était vacillant, un pied entre l’eau et la rive. Alors Matt lui donnait du boulot au salon, de plus en plus régulièrement et Jeff s’y tenait malgré tout. On lâche pas un pote, pas vrai ? Petit à petit, le loup parvenait à le ramener chaque fois un peu plus vers la rive. Même si le furet avait toujours un peu de mal avec la société, il semblait, progressivement, y revenir. En plein tatouage, Matt revenait à son salon pour y retrouver le furet. Ce dernier était penché sur le bras d’un client, le regard concentré, sans sourire. Il essuya le sang avec un chiffon avant de relever les yeux sur son modèle. C’était fini, le client était emballé, il n’y avait plus qu’à passer à la caisse. Une fois qu’il fut partit, Matt alla retourner l’écriteau pour annoncer que le salon était fermé. Puis il vint se planter devant Jeff encore en train de remplir une ligne pour voir les rendez-vous du lendemain. « J’ai de très, très bonnes nouvelles à t’annoncer, Jeffy. » Le furet releva ses yeux gris un instant, suspicieux à la vue du large sourire colgate qui étirait le visage de son ami. « Je n’aime pas vraiment les ‘très, très bonnes nouvelles’, mon pote. » « Oh si tu vas l’adorer. » Matt avait pris son sourire charmeur numéro 27, celui qui n’annonçait rien de bon, juste une grosse connerie. C’était le sourire que Matt prenait quand il avait une idée derrière la tête. « Je m’avancerai pas si vite si j’étais toi. » « Oh aller ! Regardes ça ! » Et il posa un papier sur le comptoir, forçant le furet à y jeter un œil. C’était un prospectus pour une académie, sur une île. Le punk reporta ses iris acier sur le loup qui avait plus l’air du chat de Cheshire qu’autre chose. « Wow… Génial mec… » Jeff restait plus que fermé, méfiant, quoique très légèrement surprit aussi. « Tu vas… Retourner à l’école ? T’es pas un peu vieux pour ça ? » Il prit le thermos pour s’en servir une tasse. « Heu… Non, en fait je pensais plus à toi pour être honnête. » Le furet était en train de prendre une gorgée qu’il recracha dans la seconde, essayant d’éviter d’en foutre partout. « T’es malade ou quoi ?! » Le tatoueur le fixait, toujours avec un petit sourire en coin, hilare. « Mon médecin m’a confirmé que non, je suis très sain d’esprit. » « C’est une blague. » « Non… Enfin oui c’est une blague… Mon médecin m’a jamais… Enfin bref, je pense que tu dois reprendre tes études, Jeffy. » Le punk le considéra un moment, l’air aussi ravi que s’il venait de marcher dans une merde de chien. « J’ai vingt-et-un ans… Je n’ai pas besoin de retourner à l’école. » Matt prit une grande inspiration et s’appuya sur le comptoir pour prendre son regard de persuasion. « Ouiiii… Mais Je veux VRAIMENT que tu termines études. » « J’irais pas mon vieux. Tu peux toujours courir. » Le furet sortit du comptoir, allant à sa table pour commencer à ranger le matériel de tatouage. Matt le suivit, bien décidé d’arriver à ses fins. Il s’appuya d’une main sur la table. « Okay, Ecoutes-moi, Jeffy… » Ce dernier sembla prendre sur lui, pinça les lèvres et planta son regard dans celui mordoré du loup. « J’aimerai que tu reprennes tes études parce que j’aimerai vraiment que tu deviennes mon associé, qu’on bosse ensemble ici, okay ? » « Je ne vois vraiment pas pourquoi tu veux que je retourne dans une putain d’école ! … J’ai vingt-et-un ans, j’ai plus l’âge. En plus t’as dit toi-même que j’étais bon, je tatoue déjà, je dessine, pourquoi j’irai m’emmerder dans cette foutue école ?! … » « Parce que tu peux pas toujours compter uniquement sur tes talents, Jeffy. J’ai besoin que t’ai des connaissances. Et surtout… » La conversation était un peu plus sérieuse maintenant même si Matt ne s’énervait pas, Jeff semblait être en train de bouillir gentiment. « … Je ne serais pas toujours là Jeff, tu peux pas te reposer complètement sur moi. » Matt venait de couper le feu, l’ébullition retombait comme un mauvais soufflet. Le furet regardait le loup comme si ce dernier venait de lui foutre une gifle magistrale en pleine face. « Ecoutes… » Matt le prit aux épaules et sourit gentiment, reprenant cette lueur un peu taquine, lumineuse. « Ce que j’essaye de te dire, c’est que je pourrais pas tout t’apprendre okay ? T’as besoin d’avoir ton propre bagage de connaissances. Tu as du talent, beaucoup de talent. C’est ce que je pense. Seulement tu as aussi besoin de technique. » Il fit une pause, cette fois, il avait toute l’attention du furet, il le savait rien qu’en le regardant. « Et honnêtement, entre nous, tu as vraiment besoin de renouer avec le genre humain. Tu as besoin d’amis. » « Okay d’accord… Mais pourquoi une école sur une putain d’île isolée de tout ? Une île spécialisée pour les thériantropes en plus. Tu sais ce que je pense de ce genre de truc. » « Oui je sais. C’est l’école où j’ai fait mes études et… C’est une bonne école. Et pour l’île, c’est parce que t’as besoin de changer d’environnement. » « Tu parles comme ces connards de médiateurs. » Matt le lâcha, se redressa et poussa un long soupir sans lâcher le furet du regard. « Tu as BESOIN de voir autre chose que cette ville, Jeff. Si tu veux avancer, c’est le chemin que je te propose. Je sais que ça te fous la trouille mais- » « J’ai pas la trouille. » Le furet toisait son ami, le défiait du regard, il avait de nouveau ce regard perçant, dur, froid. « Oh si tu l’as. C’est bien pour ça que depuis tout à l’heure t’essayes de te défiler. Arrêtes de fuir, Jeffy. » Matt sembla se détendre un peu, se penchant vers son ami qui n’osait plus le regarder maintenant. Le furet gardait pourtant encore cette dureté dans le regard, il serrait les dents. « J’ai quelques amis qui bossent là-bas… Dont Raphy, tu t’en souviens ? Je pense que ça serait une bonne chose et ça ne serait que pour un temps, après tu reviendras ici. » Les iris gris semblaient chercher une solution dans le vide. Puis avec une difficulté apparente, Jeff jeta un regard à son ami. « Combien de temps ? » « Trois ans. » « TROIS ANS ? » Le punk s’écarta d’un pas et poussant un soupir exaspéré. « Tu te fous de moi ? Je n’irais pas, pas moyen mec. » « C’est juste trois ans ! Il le faut. Il faut que tu vois autre chose. Ca fait trois ans que tu ères dans la ville sans but, c’est le moment de prendre une décision et d’avoir un objectif. » « … » « Tu as survécu à trois ans et demi dans la rue, tu peux survivre à trois ans dans une académie. » « … » Un sourire se mit à grandir sur les lèvres du loup. « Bien. Alors, t’en seras ? » Jeff soupira, jetant un coup d’œil vers le comptoir, il apercevait le prospectus. « Seulement trois ans hein ? … Je suppose… Que je peux y arriver. » Le visage de Matt sembla s’illuminer. « Super… Je vais aller prévenir Raphy alors ! Oh… tu te souviens de lui je suppose ? » Le Loup le regardait avec un air hilare de nouveau, le regard pétillant. « Juste un peu… » « Ca c’est pas très gentil pour lui… » Jeff eut un petit sourire en coin, accompagné d’un petit souffle du nez, amusé. « Je m’en souviens très bien. » « Je préfère, après tout vous m’avez empêché de dormir un moment cette nuit-là. » Pas totalement convaincu, pas vraiment emballé, le furet avait quand même fini par céder. Peut-être parce qu’au fond, il savait que c’était la bonne chose à faire. Cependant, il n’était pas ravi, loin de là. Trois ans et demi passé dans la solitude et là il devrait renouer brutalement avec la société dans son plus fier exemple, sa plus parfaite miniature. Tout ce qu’il détestait. Mais il irait. Pour Matt, pour lui, pour Kyle… Parce que la vie continue.
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